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Rencontre avec Cyril Bonin, scénariste et dessinateur de Du Bout des doigts !

20/06
Rencontre avec Cyril Bonin, scénariste et dessinateur de Du Bout des doigts !
À l'occasion de la sortie de Du bout des doigts, découvrez l'interview de Cyril Bonin scénariste et dessinateur ! 
 
Quelle est la genèse de ce récit ?
Cyril Bonin : À l’origine de mes histoires, il y a en général une question… Ici, il s’agit du bonheur. D’où vient-il ? Est-il en nous, dans notre manière de percevoir le monde, ou faut-il rassembler des conditions pour être heureux ? La recherche du bonheur à tout prix n’est-elle pas, au contraire, source de douleur ? D’un point de vue personnel, il m’arrive de voir mon humeur et mes émotions changer au cours de la journée, alors que je n’ai pas vécu d’événements particuliers. Cela m’intrigue… À vrai dire, je voulais traiter cette question depuis longtemps, notamment dans Amorostasia. Mais elle était trop vaste pour s’intégrer au projet. La thématique du bonheur est donc régulièrement revenue me hanter. Après tout, c’est ce qui irrigue nos vies. À travers nos rencontres, notre travail, ou nos loisirs, le but sous-jacent est la recherche du bonheur. Il en est de même dans les œuvres de fiction. Même lorsqu’il s’agit d’un récit d’espionnage, de politique, d’aventure, ou d’une comédie sentimentale, au fond, les protagonistes aspirent au bonheur.
 
Vous semblez aussi interroger la notion de « muse ». Est-elle indispensable aux artistes pour atteindre le bonheur ?
CB : Il ne s’agit pas de muse à proprement parler. Le personnage de Mathilde n’est pas une source d’inspiration pour Paul. En revanche, elle change sa manière de percevoir et de ressentir le monde autour de lui. Il me semble que la source du travail de création n’est pas contenue dans un objet (ou une personne), mais dans le regard que l’on porte sur lui, ainsi que dans notre relation au monde. Il me semble que créer est une réinterprétation, voire une recréation du monde. Les idées viennent de partout, et sont digérées, réappropriées selon la culture, l’expérience, le vécu de l’auteur… On pourrait ici objecter qu’une intelligence artificielle en ferait tout autant. Mais la grande différence vient de l’impulsion initiale, de l’étincelle qui fait qu’un auteur va décider de peindre une toile, de tourner un film, ou d’écrire un roman… Une étincelle qui est comme une nécessité intérieure. Et la source de cette étincelle reste un mystère. Elle est peut-être de même nature que l’élan vital qui coule dans nos veines.
 
L’amour – et le bonheur qu’il procure – est-il plus fort que tout, au point de pouvoir changer les personnes ?
CB : À vrai dire, nous sommes en perpétuel changement. En règle générale, ce changement se fait progressivement, imperceptiblement… Mais il arrive qu’un événement vienne accélérer le mouvement, ou agisse comme un catalyseur. Il me semble que c’est le cas du sentiment amoureux. Dans le cas d’une rencontre amoureuse sincère et profonde, on finit par s’oublier un peu pour aller vers l’autre, le découvrir, combler les petites différences entre nous, s’accompagner mutuellement, et évoluer ensemble… Cela peut mener à une véritable métamorphose.
 
Dans quelle mesure cet album a-t-il une dimension autobiographique ?
CB : Ce récit a une petite dimension autobiographique, dans la mesure où lorsque je faisais mes études aux Beaux-Arts, puis aux Arts décoratifs, l’art conceptuel irriguait le milieu de l’art et l’enseignement plastique. C’est un mouvement qui rejette l’esthétique, le geste, et la représentation, pour se focaliser sur l’idée, le discours, le concept. Ce n’est pas la voie que j’ai choisie. Il me semble que l’art conceptuel est une approche un peu réductrice de la pratique artistique. Et puis il me paraît vain de vouloir échapper à la notion d’esthétique, car toute création provoque une émotion, positive ou négative. Lorsqu’on dit que quelque chose est « beau », cela s’applique moins à l’objet qu’à l’émotion qu’il provoque en nous. Il y a donc un petit clin d’œil amical à mes années d’études, et une petite réflexion sur ce mouvement, incarné par les amis de Paul. À part cela, comme lui, j’ai fait les Beaux Arts, je travaille seul, et je n’aime pas trop conduire. Mais je n’ai pas la même attitude que lui face à la vie en général.
 
Pourquoi avoir choisi d’inscrire votre histoire dans les années 1960 ?
CB : Le personnage de Paul est un peu tourmenté, toujours insatisfait, et pessimiste… En tant que peintre, il veut développer une œuvre personnelle, hors des écoles et des courants de pensée. Sa pratique de la peinture est concrète, matiériste ; il aime se confronter à la toile… Il est à l’opposé de l’art conceptuel, qui émerge au milieu des années 1960, et où les idées et le discours priment. C’était donc un contexte approprié pour exacerber ses doutes et ses contrariétés. Par ailleurs, c’est une période historique dont j’apprécie particulièrement l’aspect visuel, le design, les costumes, les véhicules etc. J’ai également une affection particulière pour l’atmosphère des films de cette époque.
 
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