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Rencontre avec Damien Marie et Laurent Bonneau, auteurs de Ceux qui me touchent !

20/06
Rencontre avec Damien Marie et Laurent Bonneau, auteurs de Ceux qui me touchent !
À l'occasion de la sortie de Ceux qui me touchent, découvrez l'interview des auteurs Damien Marie et Laurent Bonneau !
 
Pourquoi avoir mis autant de temps entre Ceux qui me restent et Ceux qui me touchent ?
Laurent Bonneau — Je pense que cette réponse appartient en grande partie à Damien ; pour ma part, je dirais que nous avions évoqué l’idée d’une collaboration dès la sortie de Ceux qui me restent mais que nos chemins de vie et de famille se faisant, il aura fallu attendre presque 10 ans pour que nos vécus respectifs se nourrissent et se retrouvent naturellement autour de cette nouvelle histoire.
Damien Marie — Ceux qui me restent avait été une rencontre orchestrée par notre éditeur… Pour Ceux qui me touchent, il nous fallait un rendez-vous. Dès la fin de notre première collaboration nous avions l’ambition de refaire quelque chose ensemble… Et ce quelque chose allait reparler d’un rapport père-fille. Ma « Alice » naissait en même temps que notre premier livre rejoignait les librairies. J’avais besoin de la voir grandir pour raconter un nouvel « épisode » axé sur les réactions d’une enfant de 5 ans… Quelques mois après, Laurent devenait père à son tour. Au travers de ce livre, nous nous sommes aperçus de la « gémellité » de nos filles. Elles sont certainement les seules responsables de cette nouvelle collaboration !

Trouvez-vous qu’il y a un lien entre ces deux histoires ?
LB — Selon moi, oui. J’y ai vu un lien relativement évident à la première lecture du scénario, à savoir la relation père-fille mêlée aux confusions de l’esprit tout en conservant un fond de thématique sociale. Néanmoins, malgré ces liens, ce sont deux histoires différentes. C’est d’ailleurs ce que je trouve très riche.
DM — Ces histoires sont tout à fait distinctes et tout les relie. Elles sont un maelstrom de sentiments et de ressentiments. Dans les deux cas, des situations extrêmes viennent « exhauster » un regard assez contemplatif sur un père et sa fille. Elles sont surtout des regards sociaux sur ce qui nous entoure ; une lecture de nos craintes contemporaines.
 
Un 3e volet est-il prévu ?
LB — Nous l’avons évoqué, en effet. Et je pense que là aussi, les choses vont se faire naturellement, sans la contrainte du temps.
DM — Nous en avons très envie tous les deux ; la complémentarité de notre travail est d’abord un plaisir pour nous, alors pourquoi s’en priver ? Nous avons, en revanche, un degré d’exigence qui peut en effet prendre du temps… L’application et le sens que nous voulons transmettre à nos récits sont assez précis. Quelques germes de notre prochain projet grandissent, mais même s’il me tarde de collaborer à nouveau avec Laurent, il faudra que l’histoire soit rayonnante pour satisfaire nos ambitions.

Comment s’est passée cette nouvelle collaboration ?
LB — De manière évidente, je dirais. Avec tout autant de confiance et de liberté que sur Ceux qui me restent tout en étant plus exigeants, pour nous deux je crois, sur la « justesse » du rendu des ambiances et du propos.
DM — Par essence, une collaboration créative est unique, celle-ci est enrichissante car nous sommes résolument 2 narrateurs ; il n’y a pas de concession à notre objectif premier : la lecture. Notre modus operandi est d’ailleurs assez peu traditionnel. Je fournis une version romancée à Laurent, très dialoguée et assez peu descriptive. Le découpage est entièrement pensé par Laurent. Nous affinons enfin notre propos, et parfois les impacts graphiques sur le travail réalisé. Ces allers-retours enrichissent le texte original tout au long de la construction du livre. Il a été réellement « fini » dans la portée de ses émotions quelques heures avant de partir en impression.

Damien, quelle est ton intention avec cette histoire ?
DM — Je voulais que cet album nous installe dans une implacable réalité, que cette histoire nous apporte un décryptage sur ce qui nous entoure, sur notre déni d’une société qui cache ses culpabilités : la production de chair animale, la détresse des plus démunis, la marchandisation des formes d’art… Et pour m’immerger dans ces univers, je me suis pas mal documenté. J’ai par exemple visité un abattoir porcin, du quai de débarquement à la mise en barquette, pour (res)sentir ce qu’on y vit. J’ai aussi noué des relations privilégiées avec l’Armée du Salut au travers de partenariats et de maraudes au cours desquelles je me suis retrouvé dans des situations identiques à celles que vit le personnage de Fabien.

Laurent, tu joues beaucoup avec les couleurs dans cet album, comment cette idée est apparue ? Et comment devons-nous comprendre ces changements en fonction des situations ?
LB — L’idée n’en est pas une, car elle n’a pas vraiment été intellectualisée. Au début d’un projet, lors des recherches, mon premier objectif est de trouver le ou les outils graphiques qui serviront au mieux l’histoire (c’est subjectif bien entendu) tout autant que le plaisir et le défi personnels que je trouverai en expérimentant. Au final, ces changements de couleurs sont là pour raconter les différentes ambiances, souligner certaines émotions, ou encore fluidifier la narration.
DM — J’ajouterai juste qu’ici, la couleur, aussi, est narrative ; elle crée une aisance transitionnelle entre chaque scène : une ellipse qui n’a pas besoin d’être plus précisée.
 
L’art est-il partout autour de nous ou tout peut-il être un objet artistique ?
LB — Difficile de faire une réponse simple pour une question complexe... Il y aura certainement autant de réponses que de points de vue sur la question. À mes yeux, l’art est partout, lorsque nous sommes prêts à le voir. La beauté, la réflexion, l’art, existent dans le regard de celle ou celui qui y est sensible. Néanmoins, et c’est aussi ce qui en fait le grand paradoxe, l’art, je crois, est en grande partie rendu visible au monde par le marché de l’art qui décide lui-même d’imposer sa propre définition où la spéculation financière peut souvent prévaloir sur la raison ou la sensibilité.
DM — C’est en substance une question de notre livre. Son titre de travail était d’ailleurs « Le processus de création ». Pourtant, je ne suis pas sûr qu’on ait esquissé une réponse en 220 pages. Il faudrait qu’il y ait une raison unique à l’art pour qu’il y ait une seule bonne réponse. Nous avons contemplé, disséqué différents chemins qui invitent à la création artistique, qu’ils soient naturels pour Elisa, viscéraux pour Nathalie, échappatoires pour Fabien ou mercantiles pour Cuzco… L’objet artistique n’a finalement que l’importance que chacun lui concède.
 
Ceux qui me touchent est à retrouver en librairie dès le 23 août prochain.

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