Accueil / Actualités / Les compagnons de la libération
Le 16 novembre 1940, le général de Gaulle, alors chef des « Français libres » à Londres, crée l’ordre de la Libération. Tous ceux qui s’engagent à libérer la France de l’occupant nazi sont appelés à en faire partie. On les appelle les compagnons de la Libération. Ce ne sont pas seulement des individus, mais aussi des unités militaires et des collectivités civiles, comme les communes. Les profils et les opinions politiques des membres de l’Ordre sont variés. On trouve des royalistes et des communistes, des religieux et des anticléricaux, des ouvriers et des chefs d’entreprise, des Français et des étrangers. Au-delà de leurs différences, tous sont unis par l’amour de la liberté et le refus de la tyrannie. 1 038 personnes, 5 communes et 18 unités combattantes ont reçu le titre de compagnon de la Libération. Le plus jeune avait 14 ans. Parmi les personnalités célèbres, on peut citer l’écrivain Romain Gary et Dwight D. Eisenhower, président des États-Unis de 1953 à 1961. Mais on ne compte que six femmes, alors qu’elles ont été nombreuses à être entrées dans la Résistance.
 
                                                         
 
Rencontre avec jean Yves Lenaour
 
Comment décidez-vous de l’ordre dans lequel vous traitez les Compagnons ?
Il n’y a rien de scientifique là-dessous. Pour le lancement de la collection, en 2019, il nous fallait naturellement commencer avec du « lourd », c’est-à-dire des personnalités identifiées : le général Leclerc, Pierre Messmer, Jean Moulin. En effet, nous devions rendre visible la collection, l’identifier et l’installer auprès du public. Aujourd’hui, nous pouvons passer à une autre étape avec des personnages beaucoup moins connus : Simone Michel-Lévy, du réseau de résistance des PTT qui mourut en déportation ou encore Hubert Germain. Si ce dernier est devenu célèbre parce qu’il est le dernier des compagnons – il est décédé le 12 octobre dernier et son inhumation au Mont-Valérien a été conduite par le président de la République, le 11 novembre – il était à peu près inconnu des Français début 2020 quand nous avons décidé de lui consacrer une BD. Bref, pour résumer, il n’y a pas vraiment d’ordre : il existe des nécessités et des envies. Et l’envie est primordiale. Il faut prendre du plaisir à raconter une histoire pour donner du plaisir aux lecteurs.

Comment s’est déroulée la collaboration pour Hubert Germain ?
Nous avons collaboré avec Paul Franchet, Saint-Cyrien de la promotion des compagnons de la Libération. Il l’a rencontré à plusieurs reprises et nous a envoyé ses notes. Par ailleurs, Hubert Germain s’est confié à de nombreux journalistes et j’ai écumé ses interventions sur l’INA. 
 
C’est le premier biopic de la collection, vous reprenez les grands moments de la vie d’Hubert Germain. Pourquoi ce
choix ?

Ce n’est pas tout à fait un biopic. Nous nous arrêtons en 1945. Même si sa vie a été riche ensuite, avec son entrée en politique et son accès au gouvernement sous Pompidou, cela ne nous intéresse pas, car cela ne concerne plus ce qui l’a fait compagnon de la Libération. Cette collection vise à raconter comment des hommes – et même des gamins à peine sortis de l’enfance comme Germain qui a 19 ans en 1940 – refusent de se résigner, comment ils décident d’entrer en résistance alors que l’immense majorité se couche et s’aplatit. Mais vous avez raison, nous ne commençons pas en 1940, mais avec l’enfance de Germain : nous avons voulu nous attacher à un jeune homme, à sa vie, pour que l’on comprenne mieux ce moment incroyable de 1940 où il envoie tout balader. C’est un choix scénaristique : attachons-nous au personnage pour être avec lui au moment fatidique.
 
Quel a été le passage de sa vie le plus compliqué à retranscrire narrativement ?
Sur Bir-Hakeim, il m’a fallu creuser l’histoire de la bataille pour mieux comprendre quel avait pu être son rôle. Il faut savoir avec quelques bribes de témoignage inscrire l’individu au cœur de la bataille. Et donc il faut bûcher pour la rendre compréhensible pour le lecteur et non une succession de combats.
 
Quelle thématique souhaitiez-vous aborder à travers son histoire ?
C’est évidemment la question de la mémoire et de l’oubli qui est posée ici. Comment faire en sorte de ne pas oublier ces résistants de la première heure, ces hommes et ces femmes qui ont fait l’honneur du pays ? Je crois qu’en travaillant sur un des derniers compagnons – ils étaient encore quatre à l’été 2020 quand nous avons commencé cette BD – nous avons voulu dire qu’il était important de transmettre l’histoire et la mémoire, notamment aux jeunes générations. Et je suis persuadé que la BD est un médium excellent pour réaliser cet objectif. « Quand nous ne serons plus, disait Hubert Germain, la flamme de la Résistance s’éteindra… mais il restera des braises. » C’est à nous, Français d’aujourd’hui et de demain, de tisonner ces braises, car un pays c’est un héritage autant qu’un avenir.
 
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